Analyse d'un collage cubiste
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Analyse d'un collage cubiste
par Tristan Trémeau
L'analyse des collages cubistes par les historiens de l'art est souvent limitée à l'identification des objets à partir d'indices délivrés par des formes partielles ou synthétiques (les courbes d'une guitare, la volute d'un violon) et les papiers collés : un fragment de journal représenterait de façon métonymique un journal, un papier faux bois évoquerait le matériau d'une guitare ou une table.
Ces éléments se conjuguent dans Guitare (Petite Guitare éclaireur ) de Braque mais n'assurent aucune perception réaliste et stable des objets et de l'espace. Les papiers semblent disposés de façon assez autonome par rapport au dessin, qui lui-même n'impose aucune certitude quant aux objets représentés.
Une autre approche de cette oeuvre peut donc s'élaborer à partir d'une analyse formelle étayée par les interprétations des peintres abstraits russes Ivan Puni et Kazimir Malévitch.
Au premier regard, les papiers collés imposent leur matérialité et leurs couleurs (y compris le papier journal jauni) dans une vision frontale, plane et bidimensionnelle, que perçoit Malévitch. Toutefois, cet aspect est contredit par le dessin, car il suggère une profondeur spatiale illusionniste, des décrochements de plans vers le regard, appose des ombres sur le papier journal ou défait le caractère plan du papier noir sur la droite. [voir 01]
Cette contradiction entre la fonction d'aplanissement des papiers et d'illusion du dessin est aussi une quête d'équilibre, traduite par Puni sous le terme de "complémentarité réciproque immédiate" des éléments. Ainsi, la verticale du rectangle bleu est-elle contredite mais complétée par la diagonale du faux bois qui forme avec le journal une croix, cependant décalée par rapport à l'axe que constituerait le faux carré jaune. [voir 02]
Le faux carré jaune est la mutation de la rosace d'une guitare évoquée par la forme en B. [voir 03] Circulaire, il eût paru telle une "pièce rapportée" dans un secteur de l'oeuvre où dominent les formes rectangulaires. Le léger trapèze qu'il affecte permet ainsi de conjuguer verticalité et diagonale, dans le même rythme que les grandes formes centrales. Il fixe la composition dans son centre de gravité tout en préservant subtilement le dynamisme.
La forme en B suggère a priori la représentation d'une guitare par une de ses parties significatives. Cette impression est contredite par la présence, en haut, du dessin d'une volute de violon. []
L'exercice d'identification est donc inefficace pour comprendre l'oeuvre car s'impose le caractère arbitraire de la découpe, de la sélection, de l'échelle et du placement des signes. Seuls les rapports contrastés et équilibrés entre les signes comptent pour Braque.
Le caractère arbitraire des signes est dû à un exercice préalable de découpe (littérale avec le papier collé, métaphorique avec le dessin) de formes, déduites d'une guitare et d'un violon, puis rendues autonomes par rapport à leurs référents (le B, la volute), voire transformées (le trapèze jaune). La mise en rapport équilibré de ces signes implique aussi une autonomie de la composition vis-à-vis de l'éventuel sujet (ici, une nature morte).
Petite Guitare éclaireur
par Georges Braque, 1913,
fusain et papiers collés sur toile,
92 x 65 cm, coll.
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L'analyse des collages cubistes par les historiens de l'art est souvent limitée à l'identification des objets à partir d'indices délivrés par des formes partielles ou synthétiques (les courbes d'une guitare, la volute d'un violon) et les papiers collés : un fragment de journal représenterait de façon métonymique un journal, un papier faux bois évoquerait le matériau d'une guitare ou une table.
Ces éléments se conjuguent dans Guitare (Petite Guitare éclaireur ) de Braque mais n'assurent aucune perception réaliste et stable des objets et de l'espace. Les papiers semblent disposés de façon assez autonome par rapport au dessin, qui lui-même n'impose aucune certitude quant aux objets représentés.
Une autre approche de cette oeuvre peut donc s'élaborer à partir d'une analyse formelle étayée par les interprétations des peintres abstraits russes Ivan Puni et Kazimir Malévitch.
Au premier regard, les papiers collés imposent leur matérialité et leurs couleurs (y compris le papier journal jauni) dans une vision frontale, plane et bidimensionnelle, que perçoit Malévitch. Toutefois, cet aspect est contredit par le dessin, car il suggère une profondeur spatiale illusionniste, des décrochements de plans vers le regard, appose des ombres sur le papier journal ou défait le caractère plan du papier noir sur la droite. [voir 01]
Cette contradiction entre la fonction d'aplanissement des papiers et d'illusion du dessin est aussi une quête d'équilibre, traduite par Puni sous le terme de "complémentarité réciproque immédiate" des éléments. Ainsi, la verticale du rectangle bleu est-elle contredite mais complétée par la diagonale du faux bois qui forme avec le journal une croix, cependant décalée par rapport à l'axe que constituerait le faux carré jaune. [voir 02]
Le faux carré jaune est la mutation de la rosace d'une guitare évoquée par la forme en B. [voir 03] Circulaire, il eût paru telle une "pièce rapportée" dans un secteur de l'oeuvre où dominent les formes rectangulaires. Le léger trapèze qu'il affecte permet ainsi de conjuguer verticalité et diagonale, dans le même rythme que les grandes formes centrales. Il fixe la composition dans son centre de gravité tout en préservant subtilement le dynamisme.
La forme en B suggère a priori la représentation d'une guitare par une de ses parties significatives. Cette impression est contredite par la présence, en haut, du dessin d'une volute de violon. []
L'exercice d'identification est donc inefficace pour comprendre l'oeuvre car s'impose le caractère arbitraire de la découpe, de la sélection, de l'échelle et du placement des signes. Seuls les rapports contrastés et équilibrés entre les signes comptent pour Braque.
Le caractère arbitraire des signes est dû à un exercice préalable de découpe (littérale avec le papier collé, métaphorique avec le dessin) de formes, déduites d'une guitare et d'un violon, puis rendues autonomes par rapport à leurs référents (le B, la volute), voire transformées (le trapèze jaune). La mise en rapport équilibré de ces signes implique aussi une autonomie de la composition vis-à-vis de l'éventuel sujet (ici, une nature morte).
Petite Guitare éclaireur
par Georges Braque, 1913,
fusain et papiers collés sur toile,
92 x 65 cm, coll.
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